Les discours scandés de De Gaulle et Mitterrand Pour galvaniser les foules, le général de Gaulle avait un secret : marteler chaque propos. Ce rythme lent et ce ton insistant donnaient à ses discours leur solennité et leur gravité. Naturellement, celui qui incarna « la voix de la France » fut un peu perturbé par l’arrivée de la télévision, qu’il bouda d’abord pendant le 1er tour de la campagne présidentielle de 1965, avant de se prêter au jeu. Or, transposé au petit écran, ce parler « héroïque » paraît vite exagéré, en tout cas à travers nos yeux ! Cette élocution hachée, c’est sans doute la seule chose que François Mitterrand a partagée avec le général de Gaulle. Rien d’étonnant à cela, les deux hommes ont été formés à l’art oratoire tel qu’il se pratiquait sous la IIIe puis la IVe République, c’est-à-dire devant un auditoire et non des téléspectateurs. Ce parler « scandé » allait de pair avec son allure de sphinx, à la fois fier et froid. Le style ampoulé de VGE Il a bien essayé de « faire populaire », Valéry Giscard d’Estaing, en jouant de l’accordéon et en s’invitant à dîner chez les Français, mais dès qu’il s’exprimait, il était trahi par son style ampoulé façon « patate chaude dans la bouche ». Son chaleureux « au revoir » qui ponctuait ses vœux télévisés est passé à la postérité, notamment grâce aux Enfants de la télé. Jack Lang est le digne héritier de ce parler tuberculeux. Les liaisons facultatives de Chirac Jacques Chirac est connu pour avoir usé (et parfois abusé) des liaisons dites facultatives, c’est-à-dire appartenant au langage soutenu. Mieux, il avait l’habitude de distinguer la liaison du mot suivant, comme s’il s’agissait d’une syllabe à part entière ! Exemple : « C’est-e-avec gravité que je m’adresse aux Français. » Les syncopes de Sarkozy Président pressé, Nicolas Sarkozy avait l’habitude de supprimer des lettres à l’intérieur d’un mot. La phrase « M’sieur Pujadas, j’vais vous dire une chose » contient les syncopes les plus célèbres du prédécesseur de François Hollande. Pour certains, ce « parler peuple » était le fruit d’une stratégie. Pourtant, Nicolas Sarkozy s’exprimait déjà ainsi lors de son premier passage télévisé. Il avait alors 20 ans. Les anaphores de Hollande Hollande s’est fait connaître par ses anaphores (répétition d’un même mot ou groupe de mots en début de phrase) avant même d’être élu. Lors du débat télévisé de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle de 2012, face à Nicolas Sarkozy, il a répété quinze fois « Moi président de la République ». Il est également caractérisé par son phrasé parfois hésitant, en raison des pauses qu’il marquait entre les mots. Les Guignols, notamment, ne se sont pas gênés pour placer quantité de « heu… » dans la bouche de sa marionnette. Sandrine Campese À lire également sur notre blog : Chienlit, abracadabrantesque… les néologismes politiques « Mais vous avez tout à fait raison, monsieur le Premier ministre ! » (1988) « Vous êtes l’homme du passif. » (1981) « Vous n’avez pas le monopole du cœur. » (1974) Publié par Sandrine