C’est sans doute parce que les piquets ont vaguement la forme d’un petit poisson qu’ils ont été baptisés « sardine » au siècle dernier. Le terme est issu du latin sardina, littéralement « (poisson) de Sardaigne ». Un choix pour le moins étonnant sachant qu’une tente se plante dans la terre ferme et que les piquets servent à éviter qu’elle ne s’envole. Terre, air… on se demande bien ce que vient faire l’eau dans cette affaire ! Je sais, c’est à cause des conserves de poisson Saupiquet que l’on a associé la sardine et le piquet. Perdu ! La marque est le nom de famille du fondateur de la conserverie, Arsène Saupiquet. Il s’agit même d’un contraptonyme, si l’on prend « saupiquet » au sens de « sauce piquante qui accompagne du gibier ou du bœuf ». Un nom bien éloigné, donc, des saveurs de la mer… Mais revenons à nos poissons. Comme la sardine et le hareng font partie de la même famille (celle des clupéidés), ils sont, dans le jargon du petit campeur, de parfaits synonymes. Rappelons que, sous la plume de Balzac, la sardine a fini par remplacer le hareng dans l’expression « être serré comme des harengs ». C’est à l’étranger que les choses se compliquent. En français du Canada, le nom « sardine » sert également à désigner des harengs de petite taille. Les campeurs allemands, quant à eux, préfèrent employer « hareng » (haring) plutôt que « sardine ». À noter qu’en anglais, la sardine (de mer) se dit également sardine, mais la sardine (de terre) se dit peg. Comme nous, les Anglais ont un mot pour désigner le piquet de tente : stake. Mais alors, cela signifie-t-il que le piquet et la sardine ne sont pas de vrais synonymes ? En réalité, il y a deux écoles. Pour certains, la sardine est à distinguer du piquet. L’argument principal est d’ordre morphologique : la sardine est plutôt plate (d’où l’expression « être plate comme une sardine » à propos d’une fille ayant peu de poitrine) alors que le piquet est une simple tige. D’autres considèrent que le piquet et la sardine, c’est kif-kif maquereau ! Venons-en au maquereau : il désigne une grande sardine (ou un grand hareng si vous préférez), dont la taille est mieux adaptée aux sols très meubles. Dans la vie aquatique, le maquereau est un poisson à dos tacheté qui a pour rôle de rapprocher les harengs femelles des harengs mâles durant leurs migrations. Parce que, c’est bien connu, le hareng sort ! Ceci expliquerait pourquoi le hareng et le maquereau (« mac » en abrégé) sont tous deux des proxénètes. En ce sens, « maquereau » existe au féminin. On le retrouve tout en subtilité dans un kakemphaton – calembour involontaire qui engendre un énoncé comique, voire ridicule – célèbre : « Quoi ! Je ne t’ai point dit quelle était ma querelle ? » Sandrine Campese Lisez aussi sur le blog : ces mots que détestent les automobilistes… naguère, jadis… le vocabulaire du temps ; ces mots à deux orthographes. Publié par Sandrine