La tumeur Commençons par tumeur, qui est l’un des plus troublants. À l’oral, on entend « tu meurs ». Or, il est malheureusement fréquent qu’une tumeur maligne, c’est-à-dire cancéreuse, entraîne la mort. Ces deux expressions entretiennent-elles un rapport étymologique ? Pas le moins du monde ! Le nom « tumeur » vient du latin tumor qui signifie « enflure, gonflement », la tumeur étant caractérisée par le développement anormal de cellules dans le corps humain. Quant au verbe « mourir », il découle du latin morire. L’hécatombe Poursuivons dans le même registre avec hécatombe. Il est surprenant que ce nom, qui qualifie la mort de nombreuses personnes, contienne un autre nom qui lui est intimement lié : « tombe ». Ici non plus, pas d’origine commune. Littéralement, l’hécatombe (hekatombê en grec) désigne le sacrifice de cent bœufs, de hekaton, « cent » et bous « bœuf ». Aucun lien avec la tombe, du latin tumba, apparenté au tumulus, monticule placé sur la tombe. Concupiscent Voici un autre mot dont le sens caché vient en quelque sorte confirmer le sens connu : concupiscent. Cet adjectif a la particularité d’être formé par ce qu’on appelle les « syllabes sales » : con-cul-pissant. Hasard ou coïncidence, il qualifie un désir ardent et sensuel. En réalité, le mot est bien plus sage qu’il n’en a l’air puisqu’il dérive du latin chrétien concupiscens ! Dans le même esprit, citons satyre ou satire. Qu’il s’agisse de l’obsédé sexuel ou de l’œuvre critique, dans tous les cas, « ça tire » ! Découvrez nos solutions en orthographe et en expression. Platonique Platonique est l’exemple inverse. Alors que l’adjectif est censé désigner ce qui est pur, idéal, dégagé de toute sensualité, le voici flanqué du très suggestif « nique ». Comment expliquer une telle contradiction ? À l’origine, « platonique » désigne ce qui relève de la philosophie de Platon. Concurrencé par « platonicien », l’adjectif a fini par disparaître en ce sens, pour réapparaître au sein d’une formule bien connue : « un amour platonique ». Ici, « nique », ou plutôt « -ique » n’est qu’un suffixe parmi d’autres permettant de former couramment des adjectifs. Il se distingue donc de la racine arabe i-nik, qui, par analogie avec le verbe « forniquer », a fini par désigner le fait de posséder sexuellement quelqu’un. Le serment Toujours dans les sens « contrariés », le nom serment a de quoi étonner ! Comment faire sérieusement un serment, c’est-à-dire une promesse sacrée, alors que le nom contient le verbe « ment » ? Ici encore, pas de filiation historique, le « -ment » de « serment » est hérité du latin sacramentum. Il ne nous reste qu’à décortiquer le mot de la manière suivante : « des mensonges, sers m’en ! » pour obtenir le même effet. Terrien Un dernier pour la route, qui nous fait réfléchir à notre fragile condition d’humain. N’avez-vous jamais remarqué que le nom terrien faisait entendre « t’es rien » ? Certes, en latin, terra n’est pas lié à res, qui a donné « rien ». Mais c’est sûrement ce que les extraterrestres qui nous observent de là-haut pensent tout bas… Sandrine Campese Lisez aussi sur le blog : l’expression « voir midi à sa porte » ; Charles Lynch et le lynchage ; les jurons du capitaine Haddock. Publié par Sandrine