Jusqu’au XIIIe siècle, bonjour s’écrivait en deux mots, bon jour, et signifiait « jour favorable, temps heureux ». Par la suite, « bon » et « jour » se sont soudés en une formule de salutation. Pensez-y la prochaine fois que vous le lancerez à quelqu’un. C’est plus que de la politesse, c’est de la bienveillance : vous lui souhaitez tout de même de passer un « bon jour » ! On se salue, puis on se sépare. Adieu revient à recommander la personne que l’on quitte « à Dieu ». Excusez du peu ! À noter que dans le sud-ouest de la France et en Suisse, « adieu » est parfois utilisé à la place de « bonjour », lui-même employé au Québec pour « adieu ». Ami voyageur, vous voilà prévenu ! L’ancien français hui (ce jour) entre dans la composition de l’expression « au jour d’hui ». Littéralement, aujourd’hui signifie « au jour de ce jour ». Est-il bien nécessaire d’en rajouter une couche en employant « au jour d’aujourd’hui » ? À vos risques et périls ! La police du pléonasme pourrait bien vous verbaliser deux fois… Et maintenant ? Si vous lisez ce billet « pendant que vous tenez quelque chose dans la main », alors vous êtes bien main tenant. Partons dans le passé où les adverbes jadis et naguère sont souvent confondus. Ici aussi, il suffit de les décortiquer pour en saisir le sens une bonne fois pour toutes ! « Jadis » est la contraction de ja a dis, « il y a déjà des jours », et « naguère » de « n’a guère » (sous-entendu « de temps »). Fort de ces indications, vous n’écrirez pas, comme dans le numéro 1148 du magazine Science & Vie, « Naguère, le dromadaire vivait au pôle », alors que les faits remontent à 3,5 millions d’années ! Attention à sitôt (si + tôt) ! Les deux formes – en un seul mot ou en deux mots – se sont maintenues et se distinguent par leur sens : « si tôt » est le contraire de « si tard » tandis que « sitôt » peut être remplacé par « aussitôt ». Quant à lendemain, il vient de l’endemain (en + demain). Ainsi, chaque fois que l’on dit ou que l’on écrit « le lendemain » on répète sans le savoir l’article défini « le » ! Les noms n’échappent pas non plus à l’agglutination : nous avons tendance à oublier que les gendarmes sont avant tout des gens qui portent des armes et que le pourboire est le petit supplément qui permet de se payer un coup à boire ! De même, bonheur et malheur sont formés à partir de l’ancien français heur (chance), à ne pas confondre avec « heure ». Ce mot vieilli ne subsiste que dans la formule « avoir l’heur de plaire à quelqu’un ». Ajoutez « bon » ou « mal » à heur et vous créerez une fatalité heureuse ou au contraire un triste coup du sort ! Enfin, savez-vous que monsieur est l’agglutination de mon sieur, lui-même contraction de seigneur ? Ce n’est donc pas n’importe qui ! Puisque l’on parle de ces messieurs, citons quelques composés du nom « homme ». Au Moyen Âge, le prud’homme (preux + homme) avait tout d’un chevalier. En se professionnalisant, il a troqué la vaillance contre la sagesse. Le gentilhomme n’est pas plus « gentil » qu’un autre : en ancien français, l’adjectif signifie « noble ». Il se distingue donc du bonhomme, homme bon, tantôt simple et naïf, tantôt remarquable par sa valeur intellectuelle mais envers qui on affecte une certaine familiarité (La Fontaine était surnommé « le bonhomme »), quand il n’est pas relégué au rang d’homme quelconque. Attention, au pluriel, gentilhomme fait « gentilshommes » et bonhomme « bonshommes » ! Et vous, connaissez-vous d’autres mots soudés qui, une fois détachés, nous livrent leurs secrets ? Sandrine Campese Découvrez également sur notre blog : Chaussure ou soulier : que choisir ? Macchabée, chrysanthème… des expressions relatives à la mort. Cimetière, guillotine… d’autres expressions relatives à la mort. Publié par Sandrine