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Adage, aphorisme, maxime, proverbe… Quelle différence ?

Au Projet Voltaire, nous aimons enrichir notre vocabulaire ! Ce nouvel article propose une dizaine de mots, chacun désignant « une formule courte de portée générale ». Et la langue française en comporte de nombreuses ! Il n’y a pas un jour sans que nous utilisions un adage, un aphorisme, une maxime, ou encore un proverbe, parfois sans nous en rendre compte. Mais quelle est la nuance entre ces différents termes ? Sont-ils d’exacts synonymes les uns des autres, ou comprennent-ils des nuances ? Quand utiliser l’un ? Et les autres ? Trêve de bla-bla, place à notre inventaire !
Par Sandrine Campese
Une femme réfléchit devant son ordinateur portable.

ADAGE

Un adage, du latin adagium, est une énonciation courte, de portée pratique et utilisée depuis longtemps. Parfois emprunté au droit ancien, oral ou écrit, l’adage relate un fait important tiré d’une expérience considérée comme vraie par la majorité.

L’adage est proche de la maxime.On peut également estimer que c’est un proverbe ancien, maintes fois répété et transmis comme vérité.

Des adages connus : « le mort saisit le vif », « nul n’est censé ignorer la loi », « qui aime bien châtie bien ».

APHORISME

Par l’intermédiaire du latin aphorismus, l’aphorisme a une origine grecque : aphorismos.

Un aphorisme est un énoncé bref, concis, qui érige en vérité – qu’elle soit fondamentale ou banale – un fait communément observé. Tourné sous forme d’aphorisme, ce fait revêt alors un caractère sentencieux.

L’aphorisme est semblable à l’*adage. Il est également à rapprocher de la *sentence.

Des aphorismes connus : « à chacun selon son mérite », « aux innocents les mains pleines », « pas de nouvelles, bonnes nouvelles ».

APOPHTEGME

Ce nom masculin, difficile à orthographier et à prononcer ([apoftègme]), vient du grec apophthegma.

Un apophtegme est une parole mémorable exprimée de façon concise et claire par un philosophe antique. Exemple : les apophtegmes de Scipion, de Caton. Au sens strict, il consiste donc à résumer une pensée d’une grande portée, avec une dimension morale et spirituelle.

Au sens large, l’apophtegme est une formule concise sur un sujet considéré comme important par celui qui parle, mais qui est en réalité banal.

L’apophtegme est très proche de la sentence, mais aussi de la maxime. Néanmoins, on le distingue de l’aphorisme, lequel peut concerner n’importe quel sujet.

Des apophtegmes connus : « connais-toi toi-même » (Chilon de Sparte), « prudence en toute chose » (Périandre de Corinthe), « la modération est le plus grand bien » (Cléobule de Lindos).

Et l’ultima verba ? C’est l’apophtegme d’un mourant (particulièrement d’un condamné à mort), ses derniers mots prononcés.

CITATION

Plus connu que les termes précédents, le nom « citation » vient du latin citatio, -onis, qui signifie « proclamation ».

La citation est un passage que l’on extrait des propos, des écrits de quelqu’un, et que l’on cite, c’est-à-dire que l’on insère dans son propre discours. Ce « quelqu’un » peut être un auteur connu (une citation de Virgile, de Molière, de Voltaire…), mais aussi un ouvrage faisant autorité (les citations d’un dictionnaire, de la Bible…).

Pour signaler que l’on formule une citation et qu’il ne s’agit pas de nos propres propos, on a coutume de l’introduire par « je cite » et de la conclure par « fin de citation ».

Des citations connues : « Être ou ne pas être, telle est la question. » (Shakespeare), « On ne naît pas femme, on le devient. » (Simone de Beauvoir), « Vous n’avez pas le monopole du cœur. » (Valéry Giscard d’Estaing).

DEVISE

À l’origine, la devise s’employait en « héraldique » (la science du blason) pour désigner une figure emblématique accompagnée d’une courte phrase explicative. Exemple : la devise de François Ier est une salamandre, celle de Louis XIV, un soleil. Par extension, la devise est devenue cette courte phrase.

Voilà comment on est arrivé au sens actuel : une formule concise affirmant les idéaux et les symboles choisis par un groupe, un gouvernement, un État, etc. (une devise patriotique, républicaine).

Plus largement, c’est une règle de vie ou d’action propre à une personne. Exemple : « Rester libre, telle est ma devise. »

Des devises connues : « Liberté, Égalité, Fraternité » (devise de la République française), « un pour tous, tous pour un » (devise des trois mousquetaires), « le client est roi » (devise de tout bon commerçant !).

DICTON

« Une de perdue, dix de retrouvées » : dans un célèbre sketch, l’humoriste Gad Elmaleh qualifie ce dicton de « débile », et d’expliquer : « Tu as déjà vu en bas de chez toi, après une rupture, dix nanas qui attendent comme ça ? Vous êtes qui, les filles ? Eh ben, les filles du dicton ! »

Mais alors, quelle est la définition exacte du « dicton » ?

Ce nom, issu du latin dictum (« chose dite ») est une sentence d’origine populaire, souvent ancienne (un « vieux » dicton) et largement répandue. Il existe quantité de dictons régionaux (auvergnats, picards…).

« Dicton » est un quasi-synonyme de proverbe. Tant est si bien que le nom « proverbe » tend à remplacer « dicton » dans la langue courante. En effet, quand on tape « dictons célèbres » dans un moteur de recherche, on obtient… des « proverbes célèbres » !

Petite nuance tout de même : les dictons ont souvent trait aux choses de la nature. De plus, ils sont souvent très synthétiques, faisant l’économie des déterminants et la part belle à la juxtaposition.

Des dictons connus : « Noël au balcon, Pâques aux tisons », « mariage pluvieux, mariage heureux » (variante : « plus vieux »), « pluie du matin n’arrête pas le pèlerin »…

MAXIME

« Maxime » est à la fois un prénom (généralement masculin) et un nom commun de genre féminin. Ce dernier est issu de la formule latine maxima sententia, que l’on peut traduire par « pensée la plus grande », c’est-à-dire « pensée générale ».

Une maxime est une formule énonçant une règle de conduite, un principe d’action que l’on se donne, particulièrement en matière de politique et de morale. Quand elle devient un jugement d’ordre général, on parle de « maxime populaire ».

La maxime est aussi un genre littéraire illustré par les œuvres de Bossuet, de Vauvenargues et, bien sûr, de La Rochefoucauld, auteur des Réflexions ou Sentences et maximes morales, plus connu sous le titre de Maximes (1664).

Des maximes connues : « ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fît », « ne mords pas la main qui te nourrit », « qui vit sans folie n’est pas si sage qu’il croit » (La Rochefoucauld).

MORALITÉ

La moralité est avant tout une réflexion, une sentence morale. Il existait, dans le passé, des « recueils de moralité ».

Mais c’est aux contes et aux fables que nous associons spontanément la « moralité », l’enseignement moral que l’on tire d’une œuvre, ou encore la sentence morale qui précède ou suit une fable. La moralité est résumée en une ou quelques phrases, en un ou quelques vers.

En ce sens, on dit aussi plus simplement « morale ».

Plus largement, enfin, la moralité est l’enseignement que l’on tire d’une situation, la conclusion d’un événement quelconque. Il est généralement introduit par le nom « moralité ». Exemple : « moralité : ne faites pas comme moi », « moralité : ne vous mariez jamais », « moralité : soyez prudents ».

Des moralités connues : celles des Fables de La Fontaine, bien entendu, qui peuvent se trouver au début ou à la fin du texte. Au début : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point. » (Le Lièvre et la Tortue) ; « Amour, Amour, quand tu nous tiens. On peut bien dire : “Adieu prudence.” » (Le Lion amoureux).

PRÉCEPTE

« Précepte » vient du nom latin praeceptum signifiant « ordre, commandement ». Il s’agit donc d’une affaire sérieuse !

Le précepte est d’abord religieux : c’est le commandement que doivent suivre les fidèles d’une religion, et qui est souvent contenu dans les livres saints. Voilà pourquoi on dit que l’on « suit », que l’on « observe » un précepte, et ce, (quasi) religieusement !

Par extension, c’est une règle, un enseignement qui fonde et guide la conduite dans l’art, la science, la morale ou tout autre domaine.

Enfin, le sens de « précepte » s’est également « affaibli » pour désigner toute recommandation pratique enseignée par l’expérience.

Exemples de préceptes : les préceptes de l’Évangile, du Talmud, les préceptes du droit, les préceptes d’un jardinier, d’un sommelier, etc. Pour ces deux derniers exemples, il est question de bonnes pratiques, de recommandations.

PROVERBE

Issu du latin proverbium, le « proverbe » est une phrase concise et imagée exprimant un conseil populaire et pratique, une vérité de bon sens et d’expérience, et qui est devenue d’usage commun. Le proverbe relève donc de la sagesse populaire.

Le proverbe est très proche de l’*adage,du *dicton, mais aussi de la *sentence.

Un proverbe comporte généralement un verbe au présent et des pronoms indéfinis. Cela permet de favoriser sa portée universelle. On annonce souvent un proverbe par « Comme dit le proverbe… ».

Des proverbes connus : « il faut battre le fer pendant qu’il est chaud », « qui a bu boira », « à chaque jour suffit sa peine », « nul n’est prophète en son pays » (tirés des Évangiles). On en trouve de nombreux autres dans Le Livre des Proverbes ou, simplement, Les Proverbes (un des livres de l’Ancien Testament), et Cent cinquante-deux proverbes mis au goût du jour de Paul Éluard et Benjamin Péret (1925).

Notons que certains proverbes peuvent énoncer des vérités contraires, comme « tel père, tel fils » et « à père avare, fils prodigue ». La « sagesse populaire » est somme toute relative !

SENTENCE

Dans le cadre de notre inventaire, la sentence (nom issu du latin sententia, « sentiment ») n’est pas à prendre au sens de « décision d’un juge, d’un arbitre ».

Il s’agit ici d’une « phrase, souvent concise, qui exprime une vérité morale de portée générale, un précepte de conduite ». Le nom « sentence » appartient à la langue littéraire, comme l’indiquent Le Robert et le Larousse.

En héraldique (la science du blason), la sentenceprend le même sens que la *devise : c’est la courte phrase qui accompagne un emblème. Elle est également très proche du *proverbe, on parle de « sentence proverbiale ».

Notons enfin que « sentence » a produit l’adjectif « sentencieux ». « Affecter un ton sentencieux » revient à ne parler que par « sentences ». À force, on peut finir par « pontifier », c’est-à-dire « dispenser sa science, ses conseils avec prétention et emphase » !

Exemples de sentences : les sentences de Sénèque, les sentences monostiques, celles présentées dans Les Quatre Livres des Sentences de l’auteur médiéval Pierre Lombard.

Sandrine Campese

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Publié par Sandrine Campese
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