Erreur no 1 : ceci dit au lieu de cela dit Cette expression, sous sa forme erronée, est sur toutes les lèvres. Elle n’écorche plus que les oreilles des puristes, soucieux du sens des mots. Car employer ceci à la place de cela, c’est méconnaître la signification de chacun de ces pronoms démonstratifs. Stricto sensu, ceci annonce ce qui va suivre (un sujet que l’on s’apprête à évoquer) ; cela renvoie à ce qui précède (un sujet dont on vient de parler). Par conséquent, il n’est pas logique de dire et d’écrire ceci dit puisque ceci fait référence au futur et le participe passé dit au passé ! Cette contradiction est encore plus manifeste sous la forme ceci étant dit, ceci ayant été dit. Cela dit, ceci dit a pénétré l’usage, et même nos dictionnaires. Étonnamment, Le Petit Robert, tout en précisant que ceci est opposé à cela, signale cette forme dans ses exemples. Quant au Petit Larousse, il prévient : « Éviter ceci dit qui, en dépit de sa fréquence dans l’expression orale relâchée, reste déconseillé. » Même distinction avec voici et voilà. Exemples : « Voici la question : être ou ne pas être ? » / « Être ou ne pas être ? : voilà la question. » Erreur no 2 : je vous serais gré au lieu de je vous saurais gré (ou je vous serais reconnaissant) Je vous saurais gré de ne plus faire cette erreur ! Dans cette expression, au moins deux difficultés : d’une part, c’est le verbe savoir qui entre en scène, et non être. Si l’on change de mode et de temps, cela donne : je vous sais gré ! C’est bien savoir. D’autre part, le verbe est au conditionnel, puisque l’on émet un souhait. Il ne faut donc pas oublier le « s » final, terminaison du conditionnel à la première personne du singulier : je saurais (que l’on devrait prononcer [saurè]). Oublier le « s » reviendrait à conjuguer le verbe au futur : je saurai (que l’on devrait prononcer [sauré]). Si l’on change de personne, le conditionnel est plus manifeste : nous vous saurions gré. Attention enfin à la construction : on sait gré à quelqu’un de quelque chose. Exemple : « Je saurais gré à la dernière personne qui quitte les locaux d’éteindre toutes les lumières ! » Si vous tenez vraiment à employer le verbe être (et toujours au conditionnel !), ce sera avec l’adjectif reconnaissant. D’ailleurs, c’est bien le sens de l’expression « savoir gré » (avoir de la reconnaissance). Exemple : « Je vous serais reconnaissant(e) de bien vouloir m’adresser… » Pour s’entraîner, lisez également cet article. Erreur no 3 : je m’en rappelle au lieu de je me le rappelle (ou je m’en souviens) Ici aussi, un soupçon d’analyse grammaticale permet d’écarter toute confusion. Le verbe pronominal « se rappeler » est transitif direct, autrement dit, il se construit avec un complément d’objet direct (COD). Ainsi, on se rappelle quelque chose ou quelqu’un. Je me rappelle quelque chose, je me le rappelle. De même, à la forme négative : Je ne me rappelle pas quelque chose, je ne me le rappelle pas. Si vous tenez vraiment à employer le pronom « en », qui remplace généralement un complément d’objet indirect (COI), il faudra changer de verbe et utiliser « se souvenir », qui est transitif indirect. On se souvient de quelque chose ou de quelqu’un, on s’en souvient. Vous rappellerez-vous cette règle ? Vous la rappellerez-vous ? Erreur no 4 : loin s’en faut au lieu de tant s’en faut (ou loin de là) Voici ce qu’il est convenu d’appeler un « télescopage » d’expressions ! Il existe en effet deux expressions pour signifier « au contraire », même « bien au contraire » : tant s’en faut et loin de là. Par conséquent, employer « loin s’en faut », c’est emprunter à l’une et à l’autre pour créer une nouvelle expression qui ne veut pas dire grand-chose. Néanmoins, cette dernière se répand dans l’usage et si elle demeure absente des dictionnaires de référence, elle a son entrée dans le dictionnaire L’Internaute et le Wiktionnaire. L’Académie française, qui s’oppose à cette invention, précise d’ailleurs la légère nuance existant entre tant s’en faut et loin de là. « Pour repousser une allégation, indique-t-elle sur son site, on s’écriera Loin de là ! Loin de moi une telle idée ! Pour souligner un écart, une différence en nombre, en quantité, on utilisera Tant s’en faut, Il s’en faut (sous-entendu de beaucoup). Nous ne sommes pas assez nombreux, tant s’en faut. Je n’ai pas réuni cette somme, il s’en faut. » Erreur no 5 : assis-toi au lieu de assois-toi (ou assieds-toi) Le verbe asseoir (que l’on peut également écrire assoir depuis les rectifications orthographiques de 1990) a la particularité de se conjuguer de deux façons. À la première personne du présent de l’indicatif, par exemple, on peut dire et écrire : je m’assois (1re forme) ou je m’assieds (2e forme). C’est à la deuxième personne du singulier de l’impératif que les choses se compliquent encore davantage, puisque l’on voit apparaître une troisième forme, erronée, celle-ci : « assis-toi ». Or, il n’existe que deux formes possibles : assois-toi et assieds-toi, les mêmes qu’à l’indicatif présent : tu t’assois / tu t’assieds. Et aux autres personnes ? Asseyons-nous et asseyez-vous (2e forme) semblent l’emporter sur assoyons-nous et assoyez-vous (1re forme), qui sont tout aussi corrects ! Une règle sur laquelle, désormais, vous ne vous assoirez (ou assiérez) plus ! Erreur no 6 : « Après qu’il soit parti » au lieu de « après qu’il est parti » Cela « fait bizarre », et pourtant, c’est bien le mode indicatif (ici : « après qu’il est parti », au passé composé) qui suit la locution « après que ». Pourquoi ? Parce que l’indicatif est le mode du réel, de l’action réalisée. Or, si je dis « après qu’il est parti », c’est qu’il est bien parti. Voilà pourquoi c’est l’indicatif qui convient ici. Dire « après qu’il soit parti » revient à conjuguer le verbe partir au mode subjonctif, temps de l’irréel, de l’incertitude. Or, une fois encore, au moment où nous parlons, il est bien parti. En revanche, on écrit « avant qu’il soit parti », puisque l’action ne s’est pas encore déroulée : il n’est pas encore parti. Logique, non ? On pourrait également dire « après qu’il fut parti » (passé antérieur), où « fut » ne prend pas d’accent sur le « u ». Pour ne plus vous tromper, remplacez « après que » par « dès que », qui introduit aussi une action postérieure : après qu’il est (ou fut) parti = dès qu’il est (ou fut) parti. Erreur no 7 : « ça dénote » au lieu de « ça détonne » Vous voulez dire que quelque chose « n’est pas en harmonie avec un ensemble », autrement dit que ça « tranche », voire que « ça fait tache » ? Alors, vous direz que « ça détonne », puisque le verbe détonner signifie littéralement « sortir du ton ». Mais alors, pourquoi entend-on si souvent la tournure « ça dénote » ? Mystère ! De la même famille que « note », dénoter signifie : « indiquer, désigner par quelque caractéristique ». Il équivaut à des verbes comme annoncer, marquer, montrer, refléter, révéler… Exemple : Son attitude dénote un certain courage / Son attitude montre un certain courage. Ainsi, dire « ça dénote » est doublement fautif : du point de vue du sens, nous l’avons vu, mais aussi du point de vue grammatical. En effet, ce verbe est transitif, c’est-à-dire qu’il se construit toujours avec un complément. Ça dénote quelque chose, éventuellement, mais ça ne dénote pas tout court ! Erreur no 8 : « j’amène le dessert » au lieu de « j’apporte le dessert » Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes ! Amener, c’est « mener quelqu’un quelque part ». On amène généralement des êtres humains et des animaux. Exemples : amener un enfant à l’école, amener le chien chez le vétérinaire. Apporter, c’est « porter quelque chose à quelqu’un ». On apporte toujours des choses, que l’on peut porter (donc prendre avec soi, saisir, soulever). Exemples : apporter une lettre, apporter le dessert. On peut aussi apporter quelque chose au sens figuré, c’est-à-dire des choses immatérielles : apporter de l’aide, apporter des informations. Dans ce cas, apporter est proche des verbes donner ou fournir. Pour ne plus vous tromper, retenez que « on amène en donnant la main ». Exception : on « amène » des choses qui peuvent bouger, avancer (avec un moteur, par exemple !). Exemple : amener sa voiture chez le garagiste. Seul Hulk, ou un autre super-héros très très costaud, peut se targuer de « l’apporter ». Erreur no 9 : mémotechnique au lieu de mnémotechnique En français, il arrive que deux racines, l’une grecque l’autre latine, de même sens, servent à traduire la même idée. L’une n’a pas fait disparaître l’autre, les deux coexistent. Prenons le nom cheval, par exemple: le latin equus a servi à former « équestre » ou « équitation » ; le grec hippos a servi à former « hippique » ou « hippodrome ». Eh bien, c’est la même chose pour tout ce qui a trait à notre mémoire ! En latin, on dit memoria, que l’on retrouve dans « mémoire » ou « mémorisation » ; en grec on dit mnêmê, que l’on retrouve dans « amnésie » et… « mnémotechnique » ! Ce « n », si souvent oublié, vient donc du grec et a tout à fait sa place dans le mot. Pour rappel, la mnémotechnie regroupe les techniques qui, par association d’idées, aident à la mémorisation. Ces astuces, parmi lesquelles le fameux « Mais où est donc Ornicar ? » permettant de retenir les conjonctions de coordination mais, ou, et, donc, or, ni, car, sont appelées « moyens mnémotechniques » ou seulement « mnémoniques ». Erreur no 10 : quizz au lieu de quiz Le nom quiz – que l’on prononce [couiz] – est l’abréviation de l’anglais américain quizgame (avec un seul « z »). Ce mot est lui-même composé du verbe quiz (avec un seul « z »), « interroger », et du nom game, « jeu ». Il désigne un jeu de questions-réponses. Pourquoi donc est-il si souvent écrit « quizz » ? D’où vient ce second « z » ? Est-ce par « contamination » des noms terminés par deux « z », buzz et jazz, ou encore gin-fizz ? Toujours est-il qu’il fleurit impunément à la fin de notre quiz, à tel point que l’on se demande si les dictionnaires ne vont pas finir par accepter les deux orthographes, en fidèles observateurs de « l’usage ». D’autant que des marques utilisent la version à « deux z », comme cette collection de livres historiques intitulée « Le Petit Quizz » et publiée aux Éditions Pierre de Taillac. Réponse apportée par le directeur de la collection, que nous avons interrogé : « C’est un parti pris ! » Lisez également sur ce blog : comment ne plus faire de fautes d’orthographe ; les 10 règles de grammaire à connaître. Sandrine Campese Publié par Sandrine